Saint Augustin
Né dans la province romaine de Numidie, Augustin fait l'objet de toutes les sollicitudes d'un père païen, fonctionnaire de l'Empire qui le destine aux plus hautes charges dans l'administration impériale, et d'une mère chrétienne, la future sainte Monique, qui lui transmettra sa foi fervente. D'ascendance berbère et probablement punique, il sera élevé dans la culture romaine et ne connaîtra d'autre langue que le latin.
Le long périple qui le conduira jusqu'aux villes européennes débute après ses premières classes à Tagaste et à Madaure. À dix-sept ans, il arrive à Carthage. Tout en prenant part à la vie turbulente des étudiants de la capitale de l'Afrique romaine, il se forme à la rhétorique, à travers l'étude de Virgile, des historiens et des poètes latins. Mais il découvre seul la philosophie dans l'Hortensius de Cicéron, qu'il oppose à la Bible dans laquelle il voit un recueil d'histoires irrationnelles destinées à des ignorants. Il aspire à «l'immortalité de la sagesse». Ce goût pour la spiritualité n'apaise cependant pas ses passions amoureuses: à la même époque, le jeune Augustin prend une compagne, à qui il restera lié pendant plus de quinze ans. Devenu père en 372, il retrouve un équilibre inespéré en s'occupant de son fils Adéodat.
Éveillé à la philosophie, Augustin cherche obstinément une réponse à l'origine du Mal. Il rencontre alors des manichéens. Pour les disciples de Mani (216-277), le monde est partagé entre le Bien et le Mal, et les ténèbres de la Matière obscurcissent la lumière de l'Esprit. Séduit par la doctrine manichéenne, Augustin rejoint la secte dans son combat pour libérer la substance lumineuse que chacun porte en lui. Cette adhésion – qui durera neuf ans – lui redonne également l'espoir de libérer son âme de la prison de la chair.
Mais la rencontre décevante avec l'évêque manichéen Faustus précipite sa rupture avec une pensée dualiste – prisonnière de l'opposition de deux principes – qui n'admet pas la faculté de vouloir et nie la liberté et la responsabilité humaine.
En 374, Augustin est nommé professeur de rhétorique à Carthage, puis à Milan à partir de 384. Les œuvres des philosophes néoplatoniciens Plotin et Porphyre changent radicalement sa vision du monde et lui révèlent les joies de la contemplation.
La lecture des Épîtres de Paul, l'influence de sa mère, Monique, et de l'évêque de Milan, Ambroise, l'amènent à se rapprocher des chrétiens. Comme il le raconte dans les Confessions, après «le remous de ses hésitations» il vit un moment intense de déchirement intérieur. Cette «componction» le décide à se convertir.
À l'automne 386, il écrit trois ouvrages, Contre les académiciens, la Vie heureuse et l'Ordre, qui font la synthèse des trois grandes traditions: platonicienne, chrétienne et érudite. En 387, dans la nuit de Pâques, il est baptisé à Milan par Ambroise.
Du baptême à l'épiscopat
Augustin et les siens décident de rentrer en Afrique. Lors d'une halte à Ostie, peu avant la mort de Monique, mère et fils font une expérience exceptionnelle d'extase. Pendant deux années de retraite, Augustin écrit un traité (Sur la musique), un dialogue avec son fils Adéodat sur la pédagogie divine (le Maître) et un ouvrage polémique contre les manichéens (la Vraie Religion).
Alors qu'il fonde un monastère à Hippone (aujourd'hui Annaba) peu après la mort de son fils et que sa réputation ne cesse de croître dans l'Afrique chrétienne, il est amené à accepter la prêtrise: au cours d'un office présidé par le vieil évêque Valerius, il est acclamé par l'assistance qui demande son ordination immédiate. Dès lors, Augustin redouble d'activité: un débat public l'oppose, le 28 août 392, à un ancien ami manichéen, il dirige le monastère qu'il a installé dans le jardin de l'église à Hippone, et compose ses premiers commentaires sur les Psaumes.